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Constitution de partie civile : des conditions strictes et rédhibitoires

Affaires - Sociétés et groupements
Pénal - Procédure pénale
16/09/2020
Dans deux arrêts complémentaires du 8 septembre 2020, deux associations de protection de l’environnement ont vu leur constitution de partie civile rejetée par la chambre criminelle de la Cour de cassation. Important rappel des strictes conditions qui autorisent une association à se constituer partie civile à un procès pénal.
Dans le cadre du pourvoi contre l’arrêt de la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris qui confirmait l’irrecevabilité de la constitution de partie civile de deux associations, la chambre criminelle leur a rappelé la nécessité d’un dépôt de plainte préalable et celle d’un agrément ou d’un préjudice subi personnellement. En outre, elle souligne que les associations agrées ne peuvent demander réparation que des préjudices découlant des infractions limitativement énumérées par l’article L. 142-2 du code de l’environnement.

La nécessité d’un dépôt de plainte préalable

Une seule des deux associations avait initié la procédure en déposant une plainte simple. Après son classement sans suite, cette même association, ainsi qu’une autre, a déposé plainte et s’est constituée partie civile. La deuxième association, venue appuyer la première, n’avait pas déposé de plainte simple avant de déposer plainte et de se constituer partie civile. Sa constitution de partie civile a été jugée irrecevable par le juge d’instruction.

Les Hauts magistrats, statuant sur le pourvoi de cette deuxième association, ont exclu qu’une personne puisse bénéficier « par ricochet » d’une plainte simple déposée par autrui préalablement. Chaque plaignant doit donc respecter scrupuleusement le « circuit » imposé par l’article 85, alinéa 2, du code de procédure pénale. Chaque association aurait dû initialement déposé une plainte simple avant de pouvoir déposer plainte avec constitution de partie civile.

La nécessité d’un agrément ou d’un préjudice subi personnellement

En l’espèce, les deux associations avaient porté plainte pour mise en danger d’autrui en raison de la pollution atmosphérique. Celle qui avait initié l’action conformément à l’article 85 du code de procédure pénale a également vu sa constitution de partie civile contestée par le juge d’instruction, mais au motif que son agrément n’avait pas été renouvelé. En effet, l’article L. 142-2 du code de l’environnement, sur lequel elle se fondait, une association ne peut exercer les droits reconnus à la partie civile que si elle est agréée. Or, elle avait perdu son agrément en 2013, avant de déposer plainte en 2014 et 2015.

De plus, la chambre criminelle, dans ses deux arrêts du même jour (v. Cass. crim., 8 sept. 2020, n° 19-85.004, publié au Bulletin ; C. Le Stum, Atteinte à l’environnement et mise en danger d’autrui : une association peut-elle se constituer partie civile ?, Actualités du droit, 11 sept. 2020) a soutenu la position des juges d’instruction, en rappelant que, à défaut d’agrément, une association peut agir si elle a personnellement subi un préjudice. Or, le délit de mise en danger d’autrui comportant l’exposition d’une tierce personne à un risque d’atteinte à l’intégrité physique, une personne morale ne pouvait s’en prétendre victime.

Une liste limitative d’infractions

Par ailleurs, dans le deuxième arrêt évoqué, la Cour de cassation a souligné, pour confirmer l’irrecevabilité de la plainte avec constitution de partie civile, que les associations agrées, pour pouvoir exercer les droits de la partie civile sur le fondement de l’article L. 142-2 du code de l’environnement, doivent veiller à ce que l’infraction pour laquelle elles ont déposé plainte fasse bien partie de celles limitativement énumérées à cet article. Or, cet article, s’il mentionne les infractions aux dispositions législatives relatives à la protection de la nature et de l'environnement, à l'amélioration du cadre de vie, ou ayant pour objet la lutte contre les pollutions, ne mentionne pas la mise en danger d’autrui. La Cour insiste donc sur cette distinction à opérer entre les infractions mentionnées à l’article précité et celle de mise en danger d’autrui, conséquence éventuelle des premières mais exclue de celles autorisant les associations à exercer les droits de la partie civile.
Source : Actualités du droit